Mes week-ends sont pires que les vôtres

 

Ecrit durant l’hiver 2000, ce court récit a été publié l’automne suivant aux Editions du Néant.

Le livre étant épuisé, ici repose le texte intégral.

 

C’est facile de haïr les dimanches en fait. Peut-être même un peu trop en y regardant bien. Il y a le poids de la tradition, vous me direz. C’est indéniable. C’est drôlement lourd le poids de la tradition. Surtout quand ça fait déborder le reste. Moi y a plus grand chose qui déborde. Je me suis vidée il y a tellement longtemps, tellement longtemps que ça sonne tout creux tout sec au-dedans. Evidement les dimanches y étaient pour quelque chose. Ça va de soi. Mais ils n’étaient pas tout seuls, les dimanches. Non. Bien sûr. Evidemment. Calchas, dit-on, prépare un somptueux sacrifice. C’est un problème qui fond toujours en clinamen. Des sonneries carillon des facteurs parallèles. Puissé-je auparavant fléchir leur injustice. Des sermons engourdis des sarments qui se grêlent. L’offrira-t-on bientôt ? Mais quel que soit le jour jamais ne vint l’ivresse. Plus tôt que je ne veux. La chair s’alanguissait davantage à la craie la falaise s’abruptait au vain repos divin menaçant vacation me sera-t-il permis de me joindre à vos vœux je n’étais pas la seule ça je m’en doutais bien.

 

Le septième ils disaient le septième pour quoi faire. Verra-t-on à l’autel votre heureuse famille ? Et pourtant terrifiée je le savais aussi. Hélas. Car oui et c’est un fait mes sales dimanches à moi commençaient en avance. Vous vous taisez ? Peut-être pour brouiller les pistes. Pour arrêter l’écartèlement cuir pharmakos sur le tertre Filofax du semainier. Vous y serez ma fille. Ils en avaient peut-être assez, les dimanches. D’ailleurs. Ça expliquerait bien des choses. Cherchez, Prince, cherchez. Quelque part en tout cas. Pour vous trahir vous-même. Mais il y a des jours qui ne peuvent pas s’empêcher de se faire remarquer. C’est bien pour ça que c’est le bordel.

Alors. C’est pourtant tout aussi facile de haïr le plâtre asthmatique quand la porte se referme si brusque à l’orée du vendredi soir. Aussi. Pourtant il n’y peut rien le plâtre non plus. On en conclut comme d’habitude puisque ça n’est la faute de personne. A personne du tout. Il paraît en tout cas. Aux princesses esseulées de verglacer leur sang aux créneaux de la tour non je ne vois rien venir et je suis fille unique. Les charmants adultères ah Chéri montent sur leurs grands chevaux si seulement tu étais ça galope épopée près de moi la curée naturelle je s’rai prête à aimer mais coince aux entournures tout ce que je n’aime pas. Des sérails aux haras il n’y a qu’un pas ou deux ça dépend des jupons que retrousse l’écuyère. Si Cendrillon se corne et les paumes et les tempes c’est peut-être pas de leur faute aux dimanches. En fait.

J’avais besoin déjà. Ca ne peut que s’accentuer. Un coupable ventre gras. Sinon la lame je dis dans quoi la faire rentrer. La plaie à raviver. La plaie bien sûr. Mais à part ça. Elle témoigne juste à la décharge, la plaie. Vous comprendrez que ce n’est pas satisfaisant. Un coupable ventre gras qui se dégonflerait une fois dérustiné. J’en ai toujours besoin. C’est plus que nécessaire. L’hiver n’en finit pas, ses gerçures rancunières, pensera-t-il printemps quand j’aurai tout vomi. Mais la déglutition n’est pas une fin en soi. C’est la fin que je cherche. Elle m’attend quelque part. Quelque part oui mais où démembrer le coupable tout ira tellement mieux ce que j’ai fait Abner j’ai cru le devoir faire et tant pis si c’est moi qui paie de mes viscères je porte bien le chapeau surtout aux Catherinettes.

Le petit pois caché tout au fond de la boîte à musique si crânienne sautille la ritournelle quand tourne en fa la clef au sein de la serrure. Il faut donc qu’il oublie jusqu’à mon existence pour m’enfermer ainsi lorsqu’il part en week-end. Il faut donc que mon corps s’isole au mausolée en attendant le jour où seront visités les vestiges de l’amour fossilisés sous verre. Le petit poids posé à la surface thorax s’écoule de tout son plomb jusqu’aux globes oculaires. Alourdit souffle et brouille les lignes qui fuient pleutrasses au spectacle annoncé. Sur la piste étiolée se roulera dans la sciure la promesse équarrie par le soudain nanisme de son cœur tropcéphale. Quand le paon fait la roue tout confine au supplice et le zoomorphisme n’a rien pour me distraire. De la boîte à caprices s’échappe maux à maux, la Pandora vacille sous le révisionnisme. L’espoir gît repassé entre ses trois chemises empesées amidon qu’il entasse soigneusement dans son sac de voyage.

Prévoyant son huis-clos canapé dulcinée. Garcin n’oublie jamais de l’emporter, l’espoir. C’est comme sa brosse à dent. Mon désir barbedienne je peux papier coupé le laisser de côté. Si possible sur la cheminée. Les braises survivantes sauront le réchauffer, me disais-je dans le fauteuil Ikéa. Les arbres sont à abattre quand l’écorce se pourrit se raccrocher aux branches est dès lors impossible.

Il était question de trois jours. Trois jours juste trois jours mais trois jours répétés pendant des mois entiers c’est un peu long jeune-homme même pour ressusciter. Et des cendres parfois ne renaît pas l’oiseau des serments légendaires. Un œuf blanc cancéreux à la moralité. Lettres au corbeau sur félonie perché tenant prise de bec un sevrage. L’alchimie qui bouillonne alambiques et chaudrons, l’abandon frémissant encore un œil de bœuf deux pincées de mépris et laisser reposer. Une tumeur si maligne qu’elle sait ruser au point de masquer l’enterrement pourtant de première classe. La veillée trinité. Au nom du Père du Fils Brutus me ceint l’esprit tu quoque mon mari je te rendrai César la monnaie de ta pièce. Au dernier acte les mouches se trémoussent au plateau car il est des outrages qui ne peuvent être servis à louchées sans ulcère. Oui mais en attendant. En attendant s’exhibe dans la bière damassée le fœtus excisé le placenta charnier l’humus de nos vingt ans chantez haut-bois résonnez musettes. Le deuil crêpé voilette me va dit-on si bien au teint. Dès fois dès seize heures ça arrive. Des fois je pense : je n’y peux rien. Des fois je pense : c’est de ma faute. Garder l’amour c’est pas si dur. Elles sont plein à y arriver.

Quand le jeudi la crainte au ventre chatouillant sanie stomacale le sodium s’agrippe à l’iris les spasmes se rebellent oreiller. Il est volontaires lacrymaux qui se refusent à l’étouffement. On ne peut plumer Othello même si ça serait bien pratique. Quand le jeudi la nuit bascule vers les lendemains qui déchantent les cachets bleutés parfois manquent le pharmacien est regardant il est d’un pénible ce quartier. Je veille en observant la taie. Sa capacité d’absorption. La qualité des fibres, aussi.  Et si la chaleur dégouline au-delà de la tolérance. Dénouer nattes boule de gorge au mystère tétanique la couette est délavée. Le synthétique émet des doutes. N’avale jamais ma peine sans avant vérifier la teneur du liquide ma crédibilité. Analyse jolies flaques en ponctionnant pourtours pour enfin se résoudre à l’engloutir tréfonds. Le coton est confiant ou goulu je ne sais. Chaque gouttelette déposée de suite est acceptée. Vient ensuite le problème de la saturation, car au bout de cinq heures on pense à l’essorage. Ou à changer les draps à défaut de refrain. Petite enfant après les coups je me souviens maman disait : pleure pleure tu pisseras moins. A croire que les matelas, des quatre pattes aux trois, sous l’énigme du Sphinx toujours s’humidifient. Je pense au sperme frais qui déserta ma couche depuis tellement de mois. Je pense aux sanglots rances qui sont peu qualifiés pour remplir l’intérim. Je pense et c’est si rare que c’est bien étonnant que ça me fasse du mal. L’adage veut le contraire.

Parfois pour m’occuper je défais le canevas qui araigna l’anneau. Fil d’Ariane et de l’Homme, la robe blanche de Médée la couronne d’églantine l’aurore s’est avortée le doigt piqué au roué. Le vendredi souvent s’effiloche à l’envie ou l’ennui c’est selon. Les points de croix cheminent dans les vingt mètres carrés. L’aiguille vérole le cœur les dés nécrosent l’aorte quand crochète la cornée,  je ne crois plus au hasard. Procuration chandelle mon amant me délaisse suis-je la fille du lampiste ô gué vive la rose ou dois-je pour satisfaire je ne sais pas pourquoi finir au réverbère vive la rose et le lilas pendue nuit de Castille cristalline Aragon langue vanille listériose tout à fondu vous-dis-je, la flamme a vacillé quand la mèche fut vendue. A vingt-trois heures je sors et dans les rues je marche feignant d’être pressée. Je pourrais à l’instar des compagnes d’infortune déféquer mes émois contre un sexe quelconque. Les soirées parisiennes sont vertement peuplées de couillidés saumâtres aux sphincters accueillants. Au tiroir j’ai laissé le gode la libido la légèreté la soif j’ai passé l’âge aussi tout du moins il me semble.

Accoudée Pont Marie je pollue de chagrin les eaux boueuses de mars. Combien de larmes ainsi surent accroître la crue de la Seine hivernale je me demande souvent. Combien de femmes déchues il va-t-en voir une autre se sont penchées verseaux ô gué vive la rose les iris déversant leur surplus de douleur qui est plus riche que moi gonflant flots marmorins vive la rose et le lilas. Combien de silhouettes frêles on dit qu’elle est plus belle grelottèrent sur les berges ô gué vive la rose ravageant tout Paris hiver 1910 je n’en disconviens pas inondant d’affliction vive la rose et le lilas submergeant quais et brumes infiltrant jusqu’aux os on dit qu’elle est malade le fruit de la foutraille ô gué vive la rose tuberculant l’éponge pulmonaire adultère peut-être qu’elle en mourra fissurant tous les murs de leurs lamentations. Combien de toux graissées de vengeance H2O vive la rose et le lilas spasmophilièrent les gorges des voleuses d’amoureux détrempées par l’écume salée de l’abandon cette année-là. Je me demande souvent. Quand ma flaque de tristesse grossie le fleuve nocturne plus vivement qu’à mon tour que mes soupirs clochetent que les veines battent le glas je me penche pointe peton Tantale à la bascule peut-être qu’elle en mourra vive la rose et le lilas.

Cet hiver-là. Je ne sais pas pourquoi je n’ai pas pu sauter. J’ai crâné mon vertige minaudé hydrophobe aux oreilles complaisantes pour décrasser la scène du favela poison qui poussait au fossé de mon ventricule gauche. Champignon miséreux mais si elle meurt dimanche les spores dédales cartons pâtée menottes calleuses ô gué vive la rose la petite fille genoux écorchés sans mercure lundi on l’enterrera faisant l’aumône honteuse vive la rose et le lilas aux parquées nostalgies. J’ai espéré longtemps. Que la suffocation saurait rendre service. Remettant le couvert la morve obstruant trop les sinus dilatés la trachée dilettante sous l’égide eurythmique des douleurs contendantes. Cet hiver-là. Je ne sais pas pourquoi je n’ai pas pu les tuer. Il a fallu du temps mardi il r’viendra m’voir pluvieux et ombilic pour que l’esprit perdu ô gué vive la rose me revienne un matin en décachetant l’enveloppe du faire-part de décès. Monsieur et puis Madame ont la douleur. Mais je n’en voudrai pas. L’amour était mort simplement. Vive la rose et le lilas.

Il faut bien un coupable pour humecter la lame me dis-je donc encore en changeant de fauteuil. Puisque c’est par lâcheté qu’il n’y eut de noyade. Clamence à la peau dure soupirèrent les Raquin et qu’on lui coupe la tête vagit la Reine de Pique. Seul le roi des poissons peut traverser le miroir. Seul le roi des poissons. C’est pas moi qui l’ai dit. Aucun risque non. Aucun. Ce ne peut être moi. Langue de pute de vipère je ne pourrai cracher pas plus que mes braves sœurs le moindre mot entier. Ce n’est pas mon langage. La langue est infectée. Il faut bien un coupable pour humecter la langue me dis-je donc en restant dans le fauteuil osier.

Cet hiver-là. Je ne sais pas pourquoi le labyrinthe de buis m’avait fait perdre le fil arianant ma couleuvre. Il est des évènements trop dur à avaler. L’œsophage se refuse souvent à faire passer la nouvelle amourette qui perturbe la fusion l’osmose bel androgyne les deux têtes Grèce antique la promesse matinale que l’on a fait au maire devant quatre témoins et bureau acajou. Mais aucun suc gastrique ne sait en quelques heures digérer que plus rien ne se passera de beau. Tout se devait plus simple quand à force du mal fait et multiplié on perçoit qu’à Canas on regrette jusqu’aux noces et que soi-même la nuit on oublie son calvaire. Ce qui est ennuyeux quand après des kyrielles de cris de spasmes de pleurs de reviens suppliqués on se réveille soudain constatant guérison. C’est que sans la rengaine victimale on est rien. Plus rien. A tant construire sa vie sur la course à la guerre à tant jouer pion à pion stratégies conjugales à tant se perdre en lui en se couchant sans heures on se retrouve bien nue quand le désir s’enfuit.

J’ai pendant quelques mois au museau du printemps tenté de la coincer la cause du déserteur. Mon trésor mon chéri mon si joli mari sont-ce les tortures trop rudes si froidement assénées qui lassèrent à la fin l’amour que je portais. A bout de bras d’ailleurs mais pas plus loin en fait. Se fracasser la cloison nasale à la fin de l’amour. L’architecture cinglante constitue pire outrage l’amour a des limites l’amour a des limites je répète stupéfaite comme un petit enfant. Lui invoque une douceur qui m’est trop étrangère et tant d’insuffisances dont j’ignore jusqu’aux mots. Encore des mots. Il m’arrive agacée bien plus qu’abasourdie de crier caramels bonbons et chocolats. Il se peut qu’épuisé et pétri de mépris il éructe qu’avec moi le bonheur ne fut pas et qu’il ne le fût jamais. J’attends rarement l’entracte pour rétorquer au traître le bonheur n’est pas gai. Et dans ce cas c’est lui qui dit ne pas comprendre. Toujours des mots. Il me faut un coupable. Les mêmes mots. Je crois que j’ai trouvé. Je disais que ma langue se fourche en tapineuse ou en anaconda selon les circonstances. La sienne que dis-je la leur. Qu’en est-il s’il vous plaît. Jamais elle ne vacille jamais elle ne se pâte jamais elle ne s’écorche leur langue à eux aux hommes. Bien sûr qu’elle est la leur. Ils disent de jolies choses tout un tas vous savez. Qu’au commencement était le Verbe. On dit des choses de vilaines choses pour compenser. Qu’ils ont parfois la bite à la place du cerveau. Enfin c’est un exemple. Oui bien sûr mais voilà les planches anatomiques c’est trop notre truc. On a jadis pauvrettes légèrement confondu. Car si on s’appliquait à leur ouvrir la gueule à chacun ses forceps car si on s’appliquait à fourrager leur bouche au-dedans bien profond on verrait qu’à la glotte ça frétille caverneux et spongieux palpitant. Ce n’est pas le cerveau. Il faut le rectifier. C’est à la place de leur langue autant dire de LA langue qu’ils ont foutu leur queue. Et quand le doux proverbe répète qu’il faut sept fois la tourner et tourner la langue lourde et juteuse c’est une branlette muqueuse secrètement effilée qui se profile benoîte. Rendez grâce au seul nœud qui retient ma colère. Comment leur tenir tête quand dans la cavité concurrence maladroit minuscule clitoris qui s’agite si vainement tu parles pas tu caquètes. Viens poupoule viens poupoule viens à Noël le cadavre de la dinde à farcir entrouvrez-lui le bec pour vérification. La braguette autrefois était un petit sac cousu moufle chibrin c’est pour ça que le coup de la langue dans la poche je préfère me méfier.

Le vendredi souvent je lisais des histoires pour faire un peu semblant d’être très occupée. Et bien des mois après reconstituant hagarde l’emploi du temps de rien qui fut mien à ces jours je finis par comprendre que je n’y pouvais rien. Ca remonte à si loin. A si loin c’est trop tard. Pourtant. Les temps sont accomplis, Princesse il faut parler. C’est une histoire toute bête comme il y en a des tas. Du fond de la Genèse était née la cabale. C’est bien un vendredi que je n’en suis revenue. Je reposais trop blême pour me permettre le moindre pronom réflexif. Et n’est pas Dieu qui veut, ce qui est fort dommage. Lors des orées dimanche je travaillais beaucoup. A chercher le pourquoi tout me nuit et m’afflige et conspire à me nuire puisque décidément il y a bien une raison. Il était dit tout bas l’infortune des Juliette au conte des mères noyées sous les kilos golden injustice séculaire. C’est un récit joli qui s’est il y a des lustres chuchoté orifices fondant à la chandelle.

Au commencement de tout Dieu s’ennuyait beaucoup. Aussi créa-t-il l’Homme. Mais pas n’importe comment. Il prit de la poussière afin de rappeler à ses sujets futurs qu’ils seraient toujours voués à n’être que des moutons mais c’est anecdotique. La chose qui nous importe aujourd’hui plus qu’hier n’est guère le matériau qui fut utilisé. Car en même temps qu’Adam, j’ai bien lu en même temps, il façonna Lilith. Des entrailles de la Terre naquirent mâle et femelle pour le meilleur du pire mais simultanément. A l’Eden peu de règle à vrai dire même aucune mis à part l’exception devant la confirmer. Lilith et son comparse pouvaient tout se permettre les coudes sur la table la surcharge pondérale et même les doigts dans le nez. La seule chose interdite était de nommer Dieu. Lilith était chanceuse. Tous les placards secrets lui étaient accessibles nulle barbiche trop bleutée ne lui cachait de clef. Scotomiser un nom c’était moins compliqué que la zoophilie et l’ingurgitation de rainette si acide que les draps s’en souviennent autant que les boyaux.

Lilith était chanceuse mais pas plus que les filles qui la suivirent au fil des pains multipliés à travers leur minois. Le Créateur souverain avait à peine quitté le domaine idyllique qu’Adam n’eut lors de cesse de la prendre pour moindre. Lilith était patiente mais pas totalement sotte puisque les millénaires d’actif décervelage n’avaient pas pu encore la faire plier au joug de la Queue Toute Puissante. Et lorsque d’aventure son compagnon disait qu’est-ce qu’on mange ma cocotte en lisant son journal vautré au canapé il était prévisible qu’elle s’offusque un chouia. Aussi Lilith criait souvent, et n’en déplaise à Freud ce n’était ni du fait d’un Œdipe contrarié ni lié aux contractions de son doux utérus. Les Labacides alors pas plus que l’hystérie n’avaient encore frappé. Le soma il est vrai ne s’en portait pas mal. Quand chaque instant Adam sommait Lilith de jouer aux bonniches édéniques la jeune femme s’outrageait le remettant en place. Nous sommes tous les deux égaux, disait-elle à Adam, puisque nous venons de la terre. Cet argument bien sûr dut faire autorité. Mais Adam détestait passer la serpillière. Aussi fort contrarié de ne pouvoir sur elle exercer son pouvoir, décida-t-il un jour de punir la pouffiasse. Il est assez notable de constater d’ailleurs qu’à peine l’humanité commença à sévir, les hommes cherchèrent de go à être nos supérieurs. Lilith ne répondit à nul moment pourtant que la laide excroissance qui lui battait les cuisses faisait d’Adam un monstre portant l’inanité comme une légion d’honneur. Que son corps lisse à elle au creux de l’entrejambe était tellement seyant que l’esthétisme forçait au respect et au reste. Elle ne demandait rien Lilith, en fait. Juste une simple équité qui tombait sous le sens. Le pouvoir c’est à craindre lui était étranger. C’est peut être pour ça que les femmes mirent des siècles avant d’être contraintes à le saisir enfin. Il est dit dans le livre qu’Adam se refusa à accepter les faits. Là dessus, ils se disputèrent tous deux et Lilith, qui était en colère, prononça le nom de Dieu. Ce détail n’était pas un point, me suis-je dis dans le fauteuil à oreilles puisque les murs en sont aussi dotés.

Adam ne pouvait pas se plaindre à Jéhovah cahier de doléance humeurs incompatibles divorce au pedigree. Mais il fallait pourtant foutre bobonne à la porte puisqu’elle se refusait à rester aux fourneaux. La seule arme d’Adam restait déjà les mots restait encore les mots toujours les mêmes mots. A l’évidence la langue avatar du pouvoir, non pas intrinsèquement mais pour qui y aspire. Lilith déblatérait sa logorrhée naïve pendant que l’adversaire affûtait rhétorique. L’acculant chaque instant incartades langagières à s’extirper d’elle-même. A vomir vérité jusqu’à hurler ses droits en prenant un témoin pour les départager. Elle était dans le vrai et mélangea Platon avec le Judaïsme, se disant que le Dieu entendrait Parhésia. Comme quoi les bonnes femmes et la philo ça faisait déjà deux. C’est par la ruse fourbette de la langue couillidée que Lilith perdit première joute oratoire la face et la raison. Jahvé interpellé ne voulut rien entendre encore moins écouter. L’interdit transgressé fut son unique réponse, Dieu fut un peu borné ça n’étonnera personne. Pourtant. La première femme fut donc chassée en mécréante. Pour seul crime résistance à une iniquité. Pour seul tord une absence de maîtrise de la langue. Si Lilith avait su batailler la syntaxe Adam entrant en rage aurait crié mais Dieu faites la taire cette sale conne. Si la langue dominée et maniée doctement, si la sienne retenue ravalant l’interdit, Lilith aurait poussé Adam au même impaire. C’est dans le nerf buccal qu’est la racine du mal. Il n’était pas écrit mais il faut se méfier. Pour qui refusera la soumission à l’homme s’exposera à l’horreur du combat langagier. Pour qui voudra le duel n’aura le choix des armes. Terrain est miné. La chienne prend garde à toi. Les dés pipés jusqu’au scrotum. Mesdames, faites-vous tirer les premières.

Pourquoi l’hiver n’en finit pas. Bien sûr je ne serai pas la seule cette année à le faire remarquer. Non. Ma concierge aussi ce matin se plaignait mais tout de même les bottes et le manteau en plein mois d’avril vous avouerez mademoiselle que ce n’est plus possible. J’avoue. Bien volontiers. L’automne était précoce l’hiver est peine à jouir. Je n’en peux plus du tout de ma hargne qui se traîne sous ces coups de boutoir. Plus du tout. Le ciel mettant à nu ce que je tente voiler moi qui aimerais tant voir plus loin que mes naseaux et me prends sur le crâne cyclothymie rampante au gré du vasculaire météorologique. Les giboulées du cœur le civet lièvre de mars la rate marine trop lasse ça bouillonne lauriers roses. La crue du siècle ils disent. C’est un joli refrain qui se sabre au grand siècle. 1901. 2001. Une aïeule aurait-elle au jadis détrempé connu telle syncrétie je ne le lui souhaite guère.

Il m’a craché hier ce qui te rend malade et te rend si méchante c’est que sais maintenant que jamais plus jamais je ne reviendrai non. Tu sais que tu m’as perdu. Il mollarda perdu comme si il se voulait une denrée si précieuse que son absence creusait un vide quasi tangible. Mon amour mon trésor si tu crois vraiment fiston qu’ça va c’qu’a va qu’a ce que tu te goures. Ce qui me rend malade mon ange mon poussin me rend si méchante et je me retiens on est loin du compte. L’amour est mort te dis-je c’est à toi que j’en veux. L’amour est mort que dis-je tu es mort avec lui. Bien plus que séparée je me sens surtout veuve face à cet étranger qui se permet ainsi de tenir dragée haute cornets tulle crêpés noirs. Tu me jettes disloquée par-dessus les arcades m’oxydant à la ruine des défaites baptismales. Je suis la culbutée des régions inférieures. Tu suicidas l’aimé qui fécondait en toi tu poignardas l’amant avant de te repaître de ses globules fumants vois ta veule gloutonnerie humectant commissures. Tu ne riras plus de voir Cybèle en ce miroir. L’ère des bijoux s’éraille à force d’indiscrétion. Azazel est-ce toi le désert se repeuple j’en devenais trop chèvre. Car tout deuil sermonné se confine à l’oubli mais jamais rien n’arrache la racine profonde à mon immense sort engourdi de souvenirs. Le sang d’Atys coula c’est un fait accompli et le rite taurobole poursuivra son vertige au son du tambourin. L’amour avec le lion accusent leur macchabée mais à chaque sacrifice renaissent un peu plus loin de l’autel enflammé. Je n’arrêterai mon char qu’à l’aube des septièmes branches quand l’étoile chthonienne s’éteindra frissonnante. Autant prévenir tout de suite : c’est pas demain la veille.

Les week-end qui suivirent l’âge de la déraison et ses sanglots d’écume bouillonnant à Cythère s’étalèrent avec soin tartinant mes semaines. La colère fut sœurette de mon désœuvrement. Antigone entêtée mes ongles griffant la terre du rituel funérailles. Mon frère de bave de sueur je lui devais des fleurs de l’encens de la myrte mon cœur et du santal. J’ai passé bien des jours à le choyer en vain ce petit corps putride que tu abandonnais. Je caressais ses lettres ses photos ses déchets chaque trace laissée furtive au creux du lavabo. Ta crasse tes assiettes sales comme autant de reliques. Emmurée de mon chef au tombeau familial. Car il était la seule mon couple ma seule cellule. Orpheline par trois fois songeais-je à chaque minute perchée au tabouret de la cuisine salpêtre. La dépouille du mari 8 reléguée au placard son ombre vers mon lit a paru se baisser par un trop obséquieux versatile Peter Pan surgit comme un alien du Nerver-Never-Toi. J’ai tenté quelquefois de fouiller en ces limbes cabriolantes froideurs engagement rejeté tréfonds du coffre à jouets. Pour accrocher vestiges pour retrouver son âme incantations volutes en croches époumonées et moi je lui tendais mes mains pour l’embrasser. A chaque larme échappée redoublait cruauté. A chaque supplication s’avalanchaient reproches et distance roc haineux alchimie l’or en plomb vois ma pauvre comme tout change. Dans son sommeil onctueux je violais son sourire mais je n’ai plus trouvé qu’un horrible mélange nulle sauvegarde aux décombres il s’irradiait à l’autre d’os et de chair meurtris et traînés dans la fange excommuniée rêveries à l’aumône impuissante des lambeaux plein de sang et des membres affreux aux pertes irréversibles il faut savoir parfois prendre sans mouche son parti et quelques accessoires emmaillotant brocards en points moussés l’échec que des chiens dévorant se disputaient entre eux. La phalène écrasée sous l’étalon des traîtres il ne me restait plus qu’à changer de péché sous l’égide pailletée de la parturition.

A l’orgueil ornement des guerriers sacrifiés je tricotais fébrile l’écharpe pour me draper. Il en a fallut des dimanches pour que la cotte de maille se pare lourdes phalères cuirasse trop amphibie pour résister sans rouille aux torrents dévidés lorsque d’un croisement d’yeux la cataracte ourdie par ton dégoût de moi reprenait de plus laide. Il en a fallut des dimanches. Des samedi et des vendredi. Aussi. Scander la chansonette du Da’wah outrancier pour se gaver de soi n’est pas donné à qui ne pensa que par l’autre. J’avais pour ma prière quatre choix annoncés. La nature est un temple où de vivants piliers laissent parfois sortir de confuses paroles surtout quand dans sa quête on veut se préserver et du mal qui fleurit et des spleens provinciaux qui n’épargnent personne. J’avais pour ma prière le tableau consacré. Thâbit en attribut le stable dit 903 catégorie Terrible avec la Haine pour vice l’eau et l’aloès blanc Jupiter planètant le Twahyûsh pour génie et ma rage pour alliée. Mais des maux déchaînés j’y perdis mon latin et mon sens systémique. L’exorcisme islamique s’achevait aux sept voiles et Salomé baillait au plateau rutilant de tes Saints Jean Baptiste. A l’aube du sixième jour si maintes fois répétée j’amorçais pour la forme le recul m’assurant que les nœuds détendus l’étaient de part et d’autres. Le Da’wah satinait je sortais seule le soir et parfois m’octroyais une étreinte passagère dans le lit d’un vestal dont j’épargnais souvent carotide roubignoles et ce par mansuétude plus que par lassitude au petit déjeuner. L’Hostilité régna j’invoquais grand Zâhir attribut évidence qui s’imposait alors signé 1106 toujours aussi Terrible eau jasmin et Mercure Ghafûpûsh est lancé. L’écrit saint s’irisait je t’oubliais des heures et m’étonnais encore que se fut si facile en dépit de l’envie permanente de voir mouliné os et âme sous les roues qui tournent mon cher ange qui ne cessent de tourner je t’avais bien prévenu vois c’est chacun son tour. En guise de soutien mon appui guérison arabe vernaculaire je reste déracinée avant même du terreau avoir goûtée le suc l’Ecriture sibylline restait fin de journée. Le Sphinx lui-même savait qu’à la tombée nocturne une canne est nécessaire. Je m’agenouillais Ghafûr jolie divinité scandais 1285 mes doigts manucurés claquant sans aucune crampe. Son attribut sacré était Grand Pardonneur on le disait Aimable et de toutes les vertus il avait la meilleure en ces temps gangrenés où même la France moisit. Au tableau où couchaient sillons enluminures se prélassait doucette promesse Convalescence. La Terre et la Girofle embaumant à la Lune ‘Arkupûsh protégeant mes efforts et mes souhaits car c’est un bon génie pour qui sait s’y frotter. Les semaines s’enfilaient perlées petites souris à mon dernier appel le Ciel fut tellurique et exauça mes lèvres au-delà des saisons. La chatière cicatrise la porte s’est coulée plomb plus qu’un saphir blindage reculez je suis sourde les Raminagrobis expurgés en dermite les âges en sont la cause les queues de pelles et les brises sombres aussi. J’ai dit quartier d’orange Quâdir au 305 le Puissant Composé la vertu est Désir chez Vénus coquillée et dans l’eau toujours l’eau Shamyûsh saura veiller. Quâdir mon dernier Dieu. Quâdir mon suppliqué. Qui a su dans ma grêle laisser éclore le reste les bourgeons du destin les pâquerettes encensoir les roses ressuscitées. Il est beau germinal mon désir revenu. Je referme le Da’wah sa reliure brune vernie craquèle quand on la touche. La magie vergetée à l’heure où les sorcières ont de la cellulites et une carte de séjour au Gymnase Club de l’angle ce n’est pas étonnant me dis-je dans le canapé blanc.

Un lundi vint un peu plus tôt. Et j’en fut la première surprise. Peut-être parce que cette fois je préférais me taire. Peut-être parce cette fois les mots t’avaient manqués. Serait-il donc possible du moins envisageable que le scalpel luisant qui sut trancher les liens opéra dans l’alcôve du bloc réfrigéré la langue du moins la nôtre la laissant transexuelle tes bas-fonds résiliés. Serait-il donc possible que le loup hors du bois y perde repères et queue à force de cris de pierre la lapidation lasse c’est un fait entendu. Un mardi s’éveilla sans peine. S’en suivit mercredi sans le moindre incident. Je déliais en manège mon petit appendice buccal à l’hippocampe qui effectuait sagement dressage et exercices. Un jeudi se cabra en représentation nulle chute tressautassière aux obstacles infligés. Nulle chute à la décharge du logos escrimé. J’avais appris ta langue. Que dis-je ta langue la vôtre.

Plus aucun vendredi ne pourrait m’effrayer. Plus aucun vendredi. Ne parlons pas du reste. Le désir ranimant je suis le rat d’autel qui délivra le nœud à coup de dents je dis je suis le rat d’autel qui libéra poignets de mon Iphigénie. Plutôt que de chercher le coupable ventru mieux vaut plonger la lame avant qu’il y ait victime. La connaissance s’arbuste à l’anguille qui frétille au creux du je sais où je l’ai enfin pêchée votre anguille verbale qui a tout commencé. On dit la nouvelle Eve. Songez donc à Lilith et inquiétez-vous en. Les chagrins entretenus vous rongeront le cœur chacun son tétanos la salive est acide. L’impuissance engourdie la syntaxe caverneuse. Ils sont de porcelaine, les vases communicants. Ils sont de porcelaine et durent plus qu’un été. La preuve c’est qu’aujourd’hui c’est dimanche. Et lui aussi a les yeux bleus.